La Chine va “s’ouvrir davantage”, traiter “équitablement” les firmes étrangères et renforcer le rôle du marché: autant de promesses martelées mercredi par le président Xi Jinping, à l’heure où l’Etat-Parti semble pourtant conforter son emprise sur la deuxième économie mondiale.
“L’ouverture amène le progrès, la fermeture nous ramène en arrière. La Chine ne va pas fermer ses portes”, a assuré M. Xi, lors d’un discours-fleuve ouvrant le XIXe congrès quinquennal du Parti communiste (PCC) au pouvoir.
Le dirigeant, qui doit se voir octroyer un nouveau mandat de cinq ans à la tête du régime, semblait retrouver ses accents de Davos, où il avait défendu début 2017 la mondialisation et le libre-échange.
“Nous assouplirons considérablement les conditions d’accès au marché (…), nous protégerons les droits et intérêts légitimes des investisseurs étrangers. Toutes les entreprises enregistrées en Chine seront traitées équitablement”, a promis Xi Jinping mercredi sous les ors du Palais du Peuple.
Acclamé par quelque 2.300 délégués du Parti, il s’est aussi engagé, sans fournir de calendrier, à poursuivre la libéralisation du marché des changes — alors que la convertibilité du yuan demeure très encadrée.
Et le secrétaire général du PCC de promettre “le soutien au développement des entreprises privées” et “l’examen ou l’abrogation” des règlements qui empêchent “toute concurrence loyale”.
– ‘Lassitude’ –
Des engagements réformistes accueillis néanmoins avec circonspection.
En promettant l’équité aux entrepreneurs étrangers, Xi Jinping livre “un discours bienvenu” mais il reste à espérer que les fonctionnaires moins visionnaires et plus prompts à l’obstruction suivront ces directives.
L’allocution paraît contraster avec la réalité: Bruxelles et Washington, principaux partenaires commerciaux de Pékin, dénoncent ainsi volontiers le protectionnisme du géant asiatique, accumulant les enquêtes commerciales à son encontre.
Surtout, les entreprises étrangères déplorent des discriminations grandissantes face à leurs concurrents locaux et aux groupes d’Etat. Elles sont interdites d’accès à plusieurs secteurs, ou, dans d’autres, doivent impérativement s’associer en coentreprise avec un partenaire local, au prix parfois de transferts technologiques pour opérer dans le pays.
Dans ce contexte, la Chambre de commerce de l’Union européenne à Pékin a salué le discours de Xi Jinping, tout en faisant état d’une “lassitude face aux promesses” non tenues. L’unique remède est leur mise en oeuvre effective. C’est désormais plus important que jamais d’appliquer les politiques évoquées.
– Secteur étatique ‘consolidé’-
Or, le président Xi a également enjoint mercredi à “consolider et développer sans relâche le secteur public”, de sorte à “éviter la dévalorisation” des actifs de l’Etat: il faut au contraire “les renforcer et les élargir”. De quoi doucher les espoirs d’une libéralisation des entreprises d’Etat sous son second mandat.
Cela suggère que les difficultés structurelles provoquées par le rôle excessif des groupes étatiques (surcapacités industrielles endémiques, monopoles, endettement, NDLR) devraient persister.
Le régime continue en effet de choyer ses groupes étatiques, en fusionnant certains pour créer des champions nationaux — notamment dans le rail et l’énergie –, et soutenant ceux en difficulté, quitte à leur imposer une gestion jugée plus efficace.
En même temps, l’Etat semble conforter son influence sur le secteur privé: Pékin s’est récemment attaché à restreindre les investissements de grands conglomérats endettés (Wanda, Fosun, l’assureur Anbang…). En fait, Xi Jinping continue de privilégier la politique et la stabilité économique sur l’ouverture des marchés.
Le gouvernement entend ainsi s’attaquer à coup de durcissements réglementaires aux risques financiers, à l’envolée d’une dette chinoise devenu colossale, et aux dérives du marché immobilier. “Un appartement est fait pour vivre, non pour spéculer”, a tonné mercredi Xi Jinping.
Contrairement à son prédécesseur Hu Jintao il y a cinq ans, Xi Jinping n’a dévoilé aucun objectif de croissance à long terme.
A contrario, il a vanté la transition d’une “croissance rapide” à un développement économique “axé sur la qualité” et la réduction des inégalités sociales, tiré par “l’innovation” et plus respectueux de l’environnement.
Les dirigeants du Parti veulent clairement transmettre le message que la croissance économique reste importante, mais qu’elle n’est plus suffisante.
Par Jennifer Birich