Les événements des dernières semaines montrent l’isolement croissant du président auto-reconduit Félix Tshisekedi sur la scène internationale : après les manifestations hostiles organisées contre les Ambassades occidentales à Kinshasa, la signature d’un accord commercial sur les minerais rares entre l’Union Européenne et le Rwanda montre que les protestations véhémentes de la RDC ne sont nullement entendues.
Le bizarre signal envoyé par Kinshasa les samedi 10 et lundi 12 février, a, comme l’indiquait dès le 14 février le quotidien français Libération “marqué les esprits”. Le journaliste congolais Peter Tiani, joint par Libération, décrit ainsi les événements : «Samedi et lundi, c’était la psychose au centre-ville ! Surtout pour les blancs, “les mundele”, accusés d’être du côté de l’ennemi. Eux ne pouvaient pas se risquer dehors».
Dès le samedi 10 février, plusieurs ambassades, dont celle de la France, avaient en effet été assiégées par des manifestants en colère qui y avaient fait brûler des pneus, s’en étaient pris en pleine rue à des voitures du corps diplomatique, avant d’incendier des véhicules appartenant à la force de maintien de la paix de l’ONU, la Monusco. Dans les rues, des jeunes gens particulièrement excités réclamaient «le départ immédiat des Occidentaux» du pays. Le Conseil de sécurité des Nations unies, pour sa part, a condamné «les violences qui ont visé du personnel de l’ONU ainsi que du personnel et des sites diplomatiques à Kinshasa».
Or ces manifestations ont ouvertement été organisées par des proches du pouvoir actuel à Kinshasa, afin “d’impressionner” les chancelleries occidentales et de les faire changer de bord “sous la pression de la rue”. Mais cette manipulation a fait long feu, puisqu’il est très vite apparu que les manifestants étaient ultra minoritaires et que leurs slogans ne représentaient pas plus la volonté populaire que le résultat de l’élection présidentielle de décembre n’avait représenté le verdict des urnes. Manipulation électorale et manipulation dans les rues.
L’épisode a démontré une seule chose : Félix Tshisekedi se sent isolé, coupé de la communauté internationale et se livre à des réactions maladroites car précipitées.
Nouvelle preuve de cet isolement, lors de la signature le 19 février d’un protocole d’accord entre l’Union européenne et le Rwanda, pour renforcer leur coopération dans le secteur des mines notamment en ce qui concerne des matières premières critiques comme le tantale, l’or et le tungstène. Bruxelles insiste sur la traçabilité et la lutte contre le trafic de minéraux que garantit cet accord…
Thierry Breton, Commissaire au Marché intérieur de l’Union européenne, le dit explicitement : « Le Rwanda est un important fournisseur de tantale, d’étain, de tungstène, d’or et de niobium, et il dispose de réserves de lithium et de terre rares. Par ce partenariat mutuellement bénéfique, nous voulons mettre en place une chaîne de valeur résiliente et durable pour les matières premières, couvrant l’extraction, le raffinage, la transformation, le recyclage et le remplacement. La transparence, la traçabilité et les investissements sont au cœur du partenariat UE-Rwanda dans le domaine des matières premières critiques.”
Réaction jeudi 22 février de Félix Tshisekedi lors d’une conférence de presse improvisée à Kinshasa : selon lui, ce protocole, « encourage le pillage des ressources naturelles congolaises par le Rwanda »… »Quand vous achetez le produit d’un receleur, vous êtes vous-même coupable de vol », a-t-il lancé. « Donc, l’Union européenne, j’espère, ne va pas jouer ce jeu-là », Et de promettre qu’il allait « user de toutes les voies, diplomatiques et judiciaires, pour faire annuler ce Protocole d’Accord, et empêcher cette ignominie ».
Réaction de l’Union européenne? Un silence poli. Un peu comme si les vociférations du président auto-proclamé de la République “de moins en moins démocratique” (pour citer un diplomate européen) du Congo n’étaient pas du tout audibles à Bruxelles. N’étant plus écouté ni à New-York, ni à Bruxelles…
Félix Tshisekedi paye par son isolement le prix d’une ré-élection plus que douteuse, et d’une légitimité contestée par la majorité des forces politiques de RDC.
AfriqueDiplo