Les Etats-Unis inaugurent lundi à Jérusalem leur ambassade en Israël, réalisant la promesse controversée du président Donald Trump au risque d’enflammer les passions des Palestiniens qui pourraient protester massivement dans les Territoires, surtout à Gaza.
Concrétisant un engagement de campagne, le transfert de l’ambassade de Tel-Aviv à Jérusalem constitue une rupture de plus avec, en l’occurrence, des décennies de diplomatie américaine et de consensus international. Le statut de Jérusalem est l’une des questions les plus épineuses de l’insoluble conflit israélo-palestinien.
La décision américaine comble les Israéliens comme la reconnaissance d’une réalité historique de 3.000 ans pour le peuple juif. Elle coïncide avec le 70e anniversaire de la création de l’Etat d’Israël, en pleine effusion nationale et ferveur pro-américaine.
Mais l’initiative unilatérale américaine ulcère les Palestiniens pour lesquels elle représente le summum du parti pris outrancièrement pro-israélien affiché par M. Trump depuis son intronisation en 2017. Ils y voient la négation de leurs revendications sur Jérusalem.
Israël s’est emparé de Jérusalem-Est en 1967 et l’a annexée. Tout Jérusalem est sa capitale “éternelle” et “indivisible”, dit-il. Les Palestiniens veulent faire de Jérusalem-Est la capitale de l’Etat auquel ils aspirent.
La sensibilité du sujet est exacerbée par la religion. Jérusalem est sainte pour musulmans, juifs et chrétiens.
M. Trump a fait voeu de présider entre Israéliens et Palestiniens à l’accord diplomatique “ultime”. En annonçant le 6 décembre reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël, il a voulu favoriser la recherche d’une paix élusive en “retirant Jérusalem de la table”, dit-il.
Pour la communauté internationale, Jérusalem-Est reste territoire occupé et les ambassades ne doivent pas s’installer dans la ville tant que le statut n’en a pas été réglé par la négociation entre les deux parties
Des 193 pays composant l’Assemblée générale de l’ONU, 128 ont condamné la décision américaine, dont des alliés des Etats-Unis comme la France et le Royaume-Uni. Le vote a provoqué la fureur de Washington et les menaces de rétorsion de son ambassadrice à l’ONU, Nikki Haley.
Le tollé soulevé par l’initiative unilatérale américaine semble être retombé. Jérusalem est pavoisée de drapeaux israéliens et américains et d’affiches proclamant “Trump Make Israel Great Again” ou “Trump is a Friend of Zion”.
Pour le moment, le transfert de l’ambassade américaine n’a pas pour l’instant provoqué l’effet d’entraînement espéré par Israël. Seuls deux pays, le Guatemala et le Paraguay, se sont fermement engagés à déménager leur mission. Dans le passé, plusieurs pays, notamment d’Afrique et d’Amérique du Sud, ont eu leur ambassade à Jérusalem. Certains pourraient y revenir.
Après la guerre d’octobre 1973 entre Israël et une coalition de pays arabes emmenée par l’Egypte et la Syrie, la Côte d’Ivoire, le Zaïre (actuelle République Démocratique du Congo) et le Kenya ont coupé les ponts diplomatiques avec Israël et fermé les portes de leur ambassade à Jérusalem.
Quand les relations ont été rétablies, les délégations diplomatiques se sont installées à Tel-Aviv.
En 1980, Israël a voté une loi déclarant Jérusalem sa capitale “unie et indivisible”, incluant les quartiers palestiniens de la partie orientale conquise par L’Etat hébreu en 1967 et dont les Palestiniens veulent faire la capitale de l’Etat auquel ils aspirent.
Les Nations unies ont déclaré cette décision illégale et appelé les Etats qui avaient des missions diplomatiques à Jérusalem à se retirer.
La Bolivie, le Chili, la Colombie, le Costa Rica, la République dominicaine, l’Equateur, le Guatemala, Haïti, Panama, le Salvador, l’Uruguay, le Venezuela et les Pays-Bas ont obtempéré. Le Costa Rica et le Salvador sont revenus en 1984 à Jérusalem, avant d’en repartir en 2006.
Suite à la décision du président Trump, certains pays ont dit vouloir emboîter le pas et Israël tente d’en convaincre d’autres de suivre l’exemple.
Le président guatémaltèque Jimmy Morales a annoncé que son pays inaugurera mercredi son ambassade à Jérusalem tandis que le ministère des Affaires étrangères israélien a affirmé que le Paraguay ferait de même avant la fin mai.
Le gouvernement roumain social-démocrate, sous le feu de critiques américaines pour des réformes de la justice controversées, a adopté par surprise un mémorandum ouvrant la discussion sur un transfert de l’ambassade roumaine à Jérusalem. Mais le président roumain de centre droit Klaus Iohannis s’oppose à un tel transfert, le jugeant contraire au droit international. Il a appelé la Première ministre Viorica Dancila à démissionner.
Cette dernière, en visite à Jérusalem en avril, avait déclaré: “C’est notre souhait (le transfert), mais malheureusement nous ne disposons pas du soutien de la part de toutes les parties comme nous le voudrions”.
Si elle menait à bien ce transfert malgré tout, la Roumanie serait le premier pays de l’Union européenne à imiter les Etats-Unis et à rompre avec la position européenne qui, suivant les résolutions de l’ONU, considère que le statut final de Jérusalem doit être négocié entre Israéliens et Palestiniens.
Le président tchèque Milos Zeman s’est exprimé en faveur du déplacement de l’ambassade de son pays à Jérusalem mais pour l’instant son gouvernement a juste annoncé la réouverture d’un consulat honoraire et l’installation d’un centre culturel tchèque dans la ville.
Le Premier ministre japonais Shinzo Abe a assuré au président palestinien Mahmoud Abbas, lors d’une récente visite officielle, que son pays garderait son ambassade à Tel-Aviv, selon les médias palestiniens.
Afrique Diplo