Premier producteur mondial de cuivre, le Chili se creuse la tête pour trouver d’autres usages au métal rouge, dans des chaussettes ou des crèmes pour la peau, en misant sur son principal atout : sa capacité à lutter contre les bactéries.
Motivé par la chute des cours de cette matière première, pilier de son économie, le pays sud-américain a commencé depuis plusieurs années à chercher d’autres façons d’utiliser son importante production, qui a atteint 5,4 millions de tonnes métriques en 2014, soit 31% du total mondial.
La quête a porté ses fruits : depuis sept ans, on trouve dans les magasins chiliens des chaussettes élaborées avec du fil de cuivre. L’avantage? Ce métal tue les champignons et bactéries, tout en évitant les mauvaises odeurs.
“Le cuivre est antimicrobien. C’est le seul métal approuvé par l’EPA (agence américaine de protection de l’environnement, ndlr) en tant qu’agent antimicrobien. Alors, imaginez avoir cet avantage sur vos pieds, où il peut y avoir des champignons, des blessures”, explique Roberto Javier Aste, responsable de la production de l’entreprise Monarch, qui commercialise ce type de chaussettes.
“Il aide beaucoup à la cicatrisation”, ajoute-t-il.
L’efficacité du cuivre pour lutter contre les bactéries a déjà fait ses preuves : dans les salles de soins intensifs des hôpitaux, il réduit jusqu’à 58% les infections nosocomiales, assure l’entreprise d’Etat Codelco, première productrice de métal rouge au monde.
Pour cela, il suffit d’utiliser “des draps faits en fibre de cuivre qui, comme les chaussettes, nettoie l’environnement de toute menace”, précise Eduardo Foix, directeur de Codelco Lab, la filiale d’innovation de Codelco.
Dès l’arrivée à l’aéroport de Santiago, le Chili annonce la couleur, avec des guichets en cuivre aux contrôles douaniers, dont des panneaux vantent la qualité anti-microbes. On trouve aussi ce métal rouge sur les barrières des escaliers du métro ou dans certains lits d’hôpitaux.
– Anti-rides et irritations –
“Le cuivre a l’avantage que sa propriété bactéricide se fait par contact, donc quand il y a des superficies recouvertes de cuivre, n’importe quelle bactérie ou champignon meurt”, assure Eduardo Foix, un processus qui n’a aucun impact négatif sur l’environnement selon Codelco.
Avec Codelco Lab, l’entreprise d’Etat cherche à stimuler la recherche au sein des entreprises et des universités pour multiplier les usages du cuivre et diversifier ainsi ses exportations.
En médecine animale, un laboratoire local a d’ores et déjà développé un gel contre les mastites qui attaquent les pis des vaches laitières. Et le métal, qui contribue à la formation du collagène, atténue les rides et soulage les irritations, est également présent dans des crèmes pour la peau et des shampoings.
L’effort de Codelco Lab séduit aussi à l’étranger et compte désormais des partenaires stratégiques en Argentine, au Brésil, en Colombie, en Espagne, aux Etats-Unis, en Israël, en Corée du Sud et en Nouvelle-Zélande.
La Colombie a ainsi commencé à étudier l’usage du cuivre dans l’industrie textile, qu’il s’agisse de tissus ou d’habits, avec notamment en projet une gaine pour le corps à base de cuivre, pour réduire les vergetures et la cellulite.
Victor Perez, président du conseil d’administration de Codelco Lab, se réjouit de telles trouvailles : “Je pense que c’est très intéressant d’attirer l’attention des gens sur le cuivre et de redéfinir son rôle, c’est ce qu’il s’est passé ces dernières années. Il y a de l’innovation, des centres de recherche, des entrepreneurs, pour certains usages du cuivre auxquels les gens ne pensaient pas”.
Et avec ces nouvelles perspectives, “le Chili a une formidable opportunité de se positionner comme un pays leader dans le développement d’innovations du cuivre et dans l’ensemble de la chaîne du cuivre valorisé”, au-delà de ses mines traditionnelles.
Par Guylain Gustave Moke