Un tribunal de Bangui a ordonné mercredi la remise en liberté provisoire de l’un des principaux opposants en Centrafrique, Crépin Mboli Goumba, et renvoyé son procès pour “diffamation” et “outrage à magistrat” au 13 mars, selon une correspondante de l’AFP présente à l’audience.
Les ONG internationales de défense des droits humains dénoncent régulièrement la répression de toute opposition dans cet État d’Afrique centrale, classé par l’ONU parmi les quatre pays les moins développés du monde.
Après trois jours de garde à vue, Me Mboli Goumba, le coordinateur de la principale plateforme de l’opposition au pouvoir du président Faustin Archange Touadéra, comparaissait devant une chambre du tribunal de grande instance de la capitale Bangui.
“Après la demande de renvoi de ses avocats”, le prévenu “est remis en liberté provisoire avec interdiction de sortir de Bangui”, a énoncé le juge Matthieu Nana Bibi qui présidait l’audience.
“Je me suis mentalement préparé à subir tout ce qui suivra dans ce procès, en dénonçant le dysfonctionnement de la justice centrafricaine”, a lancé à l’audience Me Mboli Goumba.
Manifestement un peu affaibli mais le sourire aux lèvres, il est reparti avec des policiers pour aller signer son procès-verbal de remise en liberté dans les locaux de la police judiciaire, sous les vivats de quelques partisans criant “libéré, libéré !”. Selon son parti, Me Mboli Goumba jouit aussi de la nationalité américaine.
Président du Parti africain pour une transformation radicale et l’intégration des États (PATRIE) et coordinateur du Bloc Républicain pour la Défense de la Constitution (BRDC), la plus importante plateforme de l’opposition, il avait été arrêté à l’aéroport de Bangui dimanche à bord d’un avion de ligne qui s’apprêtait à décoller pour le Cameroun.
Le parquet avait annoncé lundi qu’il était poursuivi notamment pour des propos tenus le 20 février lors d’une conférence de presse de PATRIE et “susceptibles d’être qualifiés de diffamation et outrage à magistrats”.
Ce jour-là , Me Mboli Goumba avait notamment accusé certains magistrats de complaisance à l’égard d’accusés voire d’être corrompus, propos qu’il répétait le lendemain dans une interview à Radio France internationale (RFI) reprochant à  “la justice de ne plus être rendue au nom du peuple”.
L’opposition, dont les meetings et manifestations sont quasi-systématiquement interdits, fait aussi régulièrement l’objet de menaces et d’intimidation, dénoncent régulièrement les ONG internationales.
Un député d’opposition, Dominique Yandocka, est emprisonné depuis le 15 décembre, malgré son immunité parlementaire, pour une “tentative de coup d’État” que l’accusation n’a toujours pas étayée publiquement.
Le régime de M. Touadéra “réprime la société civile, les médias et les partis politiques d’opposition”, écrivait Human Rights Watch (HRW) en avril 2023, invoquant “de graves préoccupations sur des risques en termes de violations des droits humains et de réduction de l’espace démocratique et de la liberté d’expression”.
L’ONG exhortait aussi le pouvoir de M. Touadéra à  “garantir l’indépendance de la justice pour s’assurer que les responsables qui attaquent les détracteurs du gouvernement soient amenés à rendre des comptes”.
AFP